Aujourd’hui, c’était un grand jour, pour la directrice de la section Wahei. Les premiers cours se donnaient et enfin, elle allait pouvoir rencontrer les élèves de ces chers collègues. Malheureusement, dans cette matière qu’est l’Histoire de la Magie, elle n’allait pas pouvoir juger de leur performance en pratique magique, mais c’était déjà un bon début pour apprendre à mieux connaître les élèves et surtout mieux prendre connaissance de leurs capacités dans un nouveau domaine.

Vanina, sur sa chaise de bureau, observait sa charmante salle de classe. Celle-ci était composée d’une séquence de pupitres disposés en un demi-cercle. Cette position permettait une écoute plus attentive, comme lorsque l’on fait asseoir les petits enfants pour écouter une petite histoire. D’ailleurs c’était de ça qu’il s’agissait réellement ; on allait parler ici, d’histoires… ou plutôt d’une Histoire, avec un grand « H », l’Histoire de la Magie.

Le cours commençait dans un quart d’heure environ et les élèves n’allaient plus tarder. La japonaise n’avait jamais vraiment voulu enseigner. D’ailleurs si on lui avait prédit qu’elle le ferait dans un futur proche, elle aurait rit au nez de la personne. Et pourtant, une personne lui avait fait envisager cette solution : sa propre sœur qui travaillait, elle-même, en tant que professeur particulier. Ces deux-là étaient jumelles, et pourtant, elles restaient complètement différentes. Vanina, ambitieuse, sûre d’elle, moqueuse et parfois dure s’opposait parfaitement à Laïla, simple, peu confiante, d’une gentillesse à toute épreuve et douce. Lorsque sa jumelle lui fit remarquer que ce métier lui apporterait beaucoup, Vanina n’avait pas rit, elle ne s’était pas moquer, elle avait juste répondu qu’elle ne le pensait pas. Et en cet instant, elle se trouvait derrière un bureau prête à apporter savoir et connaissance, avec une certaine impatience bien cachée.

Un bruit dérangea les pensées de la nippone. Un élève entrait…

Ces quinze minutes de pause n’avaient décidément pas été de tout repos psychologiquement. A peine la sonnerie du Cours de Magie de Soin – très ennuyeux – avait sonné qu’il s’était précipité au quatrième en courant de peur d’arriver une nouvelle fois en retard. D’ailleurs le temps semblait être rapide et lent à la fois. Lent, car l’Equatorien avait l’impression que chaque seconde semblait s’étendre sur des heures lorsqu’il pensait à tous les points qu’il avait fait perdre à sa Section, et terriblement rapide lorsqu’il savait que l’échéance qui le séparait d’un face à face avec sa directrice se rapprochait dangereusement. Peut être qu’elle n’avait pas vu les points descendre. D’ailleurs où étaient-ils affichés ? De toute façon il était dérisoire de croire que l’une des directrices n’avait pas accès à de telles informations. Karell se traita pour la énième fois d’abruti. Lui qui voulait à tout prix rendre sa directrice fière de lui… soudain, un frisson d’horreur le parcouru. Ses livres ! Il les avait oubliés dans le dortoir … et bien évidemment où était le dortoir ? Au sous-sol. Heureusement pour le Sud-américain il n’avait pas cours de chamanisme ! Le noiraud se précipita donc à la course vers sa chambre. Heurtant – et s’excusant immédiatement – au passage des élèves qui commençaient à se diriger vers le cours d’Histoire de la Magie. Lui qui avait voulu prendre de l’avance ! Encore, encore et encore, l’Hispanophone se traita de bourrique, de crétin et d’un tas de jolis surnoms qu’il avait le don de se trouver. Une fois dans son dortoir il se précipita vers son armoire, l’ouvrit et fourra ses livres dans son sac en bandoulière noire. Ni une, ni deux, le jeune Corera se remit à courir dans les méandres de Lómilendë, priant le ciel d’arriver à l’heure.

Et justement, au moment où le chaman rentra, essoufflé, dans la pièce, l’horloge de la salle retentit. Il n’était pas en retard. Le jeune Equatorien sourit et alla directement s’asseoir vers le fond de la classe. Une fois en paix et assis. Il prit la peine d’observer le tout. Les bureaux étaient disposés en demi-cercle et, personnellement, Karell trouvait ça très joli, ci et là des étudiants des différentes Sections étaient assis et discutaient, attendant le début, imminent, du cours. Seuls trois élèves étaient encore debout. Benji – un jeune garçon plein de vie qu’il avait rencontré dans les gradins lors du duel – et … Valandra et Cassis. D’ailleurs au moment où il les regarda, les deux nécromanciennes le fixèrent le saluant chacune respectivement. Promptement, Karell se teinta de rouge et feinta qu’il devait ramasser son plumier. Il se pencha donc et … se traita de stupide lâche. « Pourquoi tu ne vas pas leur dire que … » pensa l’Equatorien, mais il fut coupé pas sa propre directrice qui demanda le silence et commença le cours. Le jeune Corera n’avait jamais été doué à l’école, même à Santa Via, mais il avait décidé que cela changerait, du moins pour ce qui était des branches enseignées par Mlle Tsukiyo. Le Sud-américain sortit donc un bloc note et se mit à relever ce que la belle nipponne disait. Luttant pour rester concentré malgré l’agaçante petite voix qui lui disait qu’il devait parler à Valandra et Cassis.

Durant les quinze petites minutes de pause, Mélusine s’endormit sur une chaise contre une fenêtre du troisième étage, épuisée. La prochaine salle de classe qu’elle devait atteindre se trouvait à deux pas seulement, ce qui lui permettait de dormir plus longtemps. Heureusement pour elle, les fines gouttelettes de pluie qui tapaient en rythme contre la fenêtre où elle s’appuyait, la réveillèrent juste à temps pour le début du cours prochain. A peine la sonnerie retentissait que la petite fille entra dans la salle de classe. Surprise en voyant Mme Tsukiyo, elle se rappela que c’était cette grande cruche qui donnait ces cours plus qu’ennuyeux. Quelle idée d’enseigner l’Histoire de la magie ! Le futur ne l’intéressant déjà pas vraiment, imaginé ce qu’elle pensait d’apprendre des stupides faits du passé. Ces anciens professeurs lui avaient affirmés qu’il fallait connaître les erreurs du passé pour ne pas les commettre encore et encore dans le futur. Et alors ? Ce n’est pas parce qu’un idiot dérangé psychologiquement avait renversé tout un système et l’avait mené à sa perte qu’on était tous assez bête pour agir comme ça. Ce genre de chose lui plaisait, il y a longtemps, quand elle était encore ignorante et que sa nature se traduisait par gentille et douce. Tout cela ne lui servirait qu’à raconter des histoires à ses enfants pour qu’ils s’endorment le soir. D’ailleurs le pressentiment qu’elle avait lui permettait d’affirmer qu’à première vue, l’ennuie de ces cours endormiraient n’importe qui en moins de vingt-deux secondes.

Elle prit place en retrait, revêtant son sourire poli et adressa rapidement un salut aux élèves qu’elle connaissait. Le cours commença, elle sortit un cahier et une plume, mais au lieux de prendre des notes, elle se mit à dessiner simplement. Bien entendu, elle écouterait les premières minutes, car peut-être elle se trompait, mais cela elle en doutait fortement.