Les deux sorciers s’approchèrent d’un banc que l’élémentaliste déneigea d’un rapide sort. Ils s’assirent. Selena profita des quelques secondes de silence qu’il laissa planer avant de lui répondre pour apprécier la beauté magistrale du paysage. C’était tout simplement féérique. La noiraude fut vite tirée de ses rêveries par Aedan. Première information. Le traitement de sa mère n’avait pas encore commencé. Rien de surprenant. Pourtant, même si elle s’y attendait, une amère déception s’empara d’elle. Un mauvais pressentiment même qui fut vite chassé par la deuxième nouvelle. Arkann était mort. Il avait perdu le contrôle. Selena pâlit, le visage néanmoins impassible. C’était la première fois qu’elle perdait un patient dont elle s’était occupée.
Très vite elle tenta de se raisonner. Arkann n’avait pas officiellement été son patient et il n’avait pas entamé la moindre thérapie. Ce n’était pas son patient. Elle n’était pas responsable. Malgré ça, la Finno-Hongroise ne réussit à ouvrir la bouche, noyée dans la culpabilité. Elle aurait tant voulu l’aider, elle aurait pu y arriver. Elle le savait. Malheureusement, les choses s’étaient enchainées et… plus rien. On lui annonçait sa mort.
Fébrile, la nécromancienne remercia Aedan faiblement de l’avoir tenue informée. En y réfléchissant ce n’était pas vraiment une surprise non plus. Elle l’avait d’ailleurs elle-même mentionné dans son rapport. Arkann était instable et potentiellement dangereux pour lui-même et les autres. Un instant, la psychologue fut saisie d’un doute. Masaryk. L’article lui revint en tête, tout comme l’étrange pressentiment à propos de Lómilendë qui ne voulait jamais la quitter… puis son regard croisa celui du docteur O’Briain et toutes ses suspicions s’envolèrent. D’une voix un peu plus assurée lui proposa.
Les morts appartiennent au passé et la vie ne se joue jamais dans l’écho de leur souvenir.
Selena sourit avec douceur. En tant que nécromancienne, elle avait dû apprendre mieux que personne que la mort était immuable et que la frontière qu’elle traçait entre les êtres infranchissable malgré toute la teneur de l’Art Obscur. Grand tourment que celui de la mort pour les nécromanciens. Comment accepter celle des êtres qui leur sont chers sachant qu’ils ont la possibilité de les relever d’outre-tombe ? Si la maîtrise de l’Art Obscur consistait majoritairement en des aspects techniques l’acquisition d’un sens éthique de la mort et de sa compréhension était indissociable de l’appertisasse de la nécromancie.
La Finno-Hongroise se leva et invita Aedan à la suivre.
Nous devrions rentrer profiter de la fête. Peut-être seriez-vous-même prêts à m’accorder une danse ?
Les deux sorciers reprirent donc le chemin de la salle de bal, marchant silencieusement côte à côte, si proches l’un de l’autre que les doigts en vinrent à s’effleurer furtivement quelques fois. La noiraude se surprit à apprécier ses courts moments d’intimité. Aedan, par sa présence la calmait, la rassurait. Il avait quelque chose de spécial, de presque familier et pourtant si différent. Il était intriguant. Au final, la nécromancienne espérait vraiment qu’il l’invite à danser. Passer la soirée à ruminer ce qu’il lui avait annoncé, une bouteille de champagne à proximité, n’était pas envisageable. Il fallait qu’elle oublie, qu’il lui fasse oublier.
[HS : Le topic à deux le plus court de l'histoire mais je pense qu'on peut déjà retourner au banquet ^^]